Précisions sur la situation des époux avant le mariage et prestation compensatoire
Dans une décision du 3 avril 2019, la Cour de cassation a cassé une décision de la Cour d’appel ayant écarté la demande de prestation compensatoire d’une épouse en se fondant sur la situation patrimoniale des époux antérieurement au mariage.
En l’espèce, les époux se sont mariés sous le régime de séparation des biens. Cependant, s’agissant d’un second mariage, les deux époux avaient déjà eu l’opportunité de mener leur carrière et d’effectuer des placements immobiliers et bancaires. L’épouse souhaite obtenir une prestation compensatoire du fait de ses revenus annuels beaucoup moins importants que ceux de son époux qui, en plus de sa retraite, touche des sommes conséquentes du fait de placements en avoir et immobilier.
Les juges du fond déboutent l’épouse de sa demande en considérant que les revenus de l’époux provenaient de l’existence de droits et de biens antérieurs au mariage, et cette situation a été maintenue par leur volonté d’être soumis au régime de séparation des biens lors de leur mariage.
Le divorce met fin au devoir de secours entre les époux. Toutefois, afin de contrevenir aux effets négatifs que pourrait avoir la rupture du mariage sur la situation d’un des époux, le législateur a établi un système de prestations compensatoires par la loi du 30 juin 2000. Son objectif est de « compenser, autant qu'il est possible, la disparité que la rupture du mariage crée dans les conditions de vie respectives » (article 270 du Code civil).
Afin de prétendre à obtenir une prestation compensatoire, l’époux doit prouver qu’il existe une disparité dans les conditions de vie respectives des époux du fait de la rupture du mariage.
Selon l’article 271 du code civil, le juge peut prendre en considération différents éléments pour fixer la prestation compensatoire. Il s’agit de la durée du mariage, de l’âge et de l’état de santé des époux, de leur situation professionnelle, les conséquences des choix professionnels faits par l’un des époux au cours de la vie commune pour l’éducation des enfants ou pour se consacrer ou favoriser la carrière de son conjoint au détriment de la sienne, le patrimoine estimé des époux, les droits existants ou prévisibles, leur situation respective en matière de pensions de retraite notamment.
Dans cette affaire, la Cour de cassation casse la décision de la Cour d’appel. Elle rappelle une condition essentielle à l’attribution de cette prestation : la disparité dans les conditions de vie des époux doit être la conséquence de la rupture du mariage. Ainsi, ne doit pas être pris en considération le caractère antérieur de la possession des biens des époux ou le régime de séparation des biens établi lors du contrat de mariage des époux.
La Cour énonce alors : « si la prestation compensatoire n'a pas pour objet de corriger les effets d'un régime de séparation de biens, les juges du fond sont tenus de s'attacher à la disparité liée à la rupture du mariage, sans tenir compte de la situation patrimoniale des époux antérieure au mariage ».
Elle estime que les juges du fond ont violé les articles 270 à 272 du Code Civil puisqu’ils ont écarté la demande de prestation compensatoire de l’épouse en considérant que, le mariage ayant été tardif, les époux avaient déjà eu l’opportunité de mener leur carrière. Pour la Cour de cassation, il est possible de considérer la situation antérieure des époux lorsque le mariage a été de courte durée. Cependant, tel n’est pas le cas en l’espèce puisque le mariage a duré 19 ans.
Cass Civ. 1re, 3 avril 2019, n° 18-13.544
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