L’obligation de titre de séjour pour le travailleur détaché non-européen
Le Conseil d’État a estimé le 30 janvier dernier que le droit de l’Union européenne, et plus particulièrement les règles relatives au détachement, ne faisaient pas obstacle aux dispositions de l’article L. 311-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Cet article impose à tout étranger âgé de plus de dix-huit ans qui souhaite séjourner en France pour une durée supérieure à trois mois d’être titulaire d’un titre de séjour valide, sous réserve de dispositions particulières d’engagements internationaux. Ce titre de séjour peut consister notamment en un visa de long séjour, une carte de séjour temporaire, une carte de séjour pluriannuelle ou encore en une carte de résident. Toutefois cet article ne s’applique pas aux citoyens de l’Union européenne ni aux ressortissants d’un autre État partie à l’accord sur l’Espace économique européen ou de la Confédération suisse.
La question était donc ici de savoir si un ressortissant d’un pays extérieur à l’Union européenne, en situation régulière dans un État membre et détaché en France pour une période de plus de trois mois, devait être en possession d’un tel titre de séjour.
Pour rappel, la qualité de travailleur détaché est un statut permettant à un employé travaillant dans un État membre de l’Union européenne d’être envoyé par son employeur dans un autre État membre afin d’y effectuer une prestation de services à titre temporaire. Dans ce contexte, les salaires et conditions de travail en vigueur sont celles du pays d'accueil alors que les cotisations sociales restent celles du pays d'origine. L’utilisation du détachement est libre et ne peut être conditionnée à une autorisation préalable.
En l’espèce, un ressortissant Equatorien séjournait en France et y travaillait pour le compte d’une société établie en Espagne avec le statut de travailleur détaché. Après plusieurs années dans le pays, la préfecture a décidé de le remettre aux autorités espagnoles en raison de son absence de titre de séjour pour la France.
Après avoir contesté l’arrêté devant le tribunal administratif en vain, l’intéressé a fait appel de la décision mais, là encore, sa demande d’annulation a été refusée. Le Conseil d’État a ici donné droit aux juges du fond et a estimé que l’article L. 311-1 du CESEDA s’appliquait bien « aux ressortissants de pays tiers, en situation régulière dans un État membre de l’Union européenne, qui sont détachés en France dans le cadre d’une prestation de service ». Il en résulte donc que ces derniers doivent, pour rester sur le territoire pour une période de plus de trois mois, se voir attribuer un titre de séjour par les autorités françaises.
Le Conseil d’État considère en effet que « cette obligation, qui se rattache aux conditions générales de séjour applicables à tous les étrangers sous les réserves mentionnées à l’article L. 311-1, ne constitue pas une autorisation préalable au détachement de travailleurs sur le territoire français et ne porte pas d’atteinte injustifiée à la libre prestation de services résultant de l’article 56 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ».
CE, 30 janvier 2019, req. n°415818
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