Fraude paulienne : Un assouplissement du caractère certain de la créance
L’action paulienne est l’action par laquelle un créancier agit contre son débiteur qui tente d’échapper à ses obligations par un comportement frauduleux. Trois conditions sont nécessaires :
- Il faut que l’acte attaqué ait contribué à rendre le débiteur insolvable et que cela ait causé un dommage au créancier en le privant de recouvrer sa créance ;
- Il faut une intention frauduleuse du débiteur ;
- Il faut que la créance soit certaine.
Par un arrêt du 24 mars 2021, la Chambre commerciale de la Cour de cassation est venue tempérer l’exigence de certitude de la créance en cas d’action paulienne.
Dans les faits, une banque avait consenti des prêts à une société, et ces derniers avaient été cautionné. Par la suite, la société a été placée en liquidation judiciaire. La banque a donc assigné les cautions en paiement de sa créance.
Cependant, antérieurement à la mise en liquidation du débiteur principal, les cautions avaient créé une SCI à laquelle ils ont apporté un immeuble dont ils étaient propriétaires. Par la suite, ils ont également consenti une donation à leurs enfants, portant sur la nue-propriété de la quasi-totalité des parts sociales de cette SCI.
Par ces actes, les cautions ont frauduleusement organisé leur insolvabilité. Dès lors, le créancier les a assignés sur le fondement de la fraude paulienne pour que l’apport de l’immeuble et la donation soient déclarés inopposable au créancier.
Dans un premier temps, la cour d’appel a considéré que le créancier n’était pas fondé à invoquer la fraude paulienne, car pour cela, il est nécessaire que le créancier prouve qu’il dispose d’une créance certaine au moment où le juge statue. En l’espèce, antérieurement à cette action, l’engagement des cautions avait été jugé manifestement disproportionné, donc la banque n’avait plus de créance contre les cautions.
La Haute juridiction a cassé cet arrêt. Bien qu’en principe le créancier doit prouver une créance certaine à la date de l’acte argué de faute et au moment où le juge statue sur son action, « le créancier qui exerce l’action paulienne contre la caution est recevable à agir si l’absence de certitude de sa créance est imputable aux agissements frauduleux qui fondent cette action ».
Ainsi, la cour d’appel aurait dû rechercher si le patrimoine des cautions ne leur aurait pas permis de faire face à leur obligation au moment où elles ont été appelées.
Cet arrêt vise ainsi à permettre plus facilement l’exercice d’une telle action pour le créancier victime d’une fraude de son débiteur.
Cass. Com. 24 mars 2021, n°19-20.033
Cette actualité est associée aux catégories suivantes : Droit civil
- mai 2021
- mai 2019
- février 2019
- janvier 2019
- août 2017
- février 2017
- février 2016